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La douleur - Marguerite Duras

Dernière mise à jour : 28 nov. 2020

Ma note: 5/5

Mots Clés :

Journal, récit, roman, littérature française, roman contemporain, littérature contemporaine, autobiographie, témoignage, résistance, camps de concentration, camps de la mort, traumatisme, écrivain femme, écrivaine, auteure, attente, amour, guerre, seconde guerre mondiale, déportation, France, XXème siècle, occupation, Dachau, souffrance(s), faiblesse(s), Gestapo, douleur, espoir, crématoires, nazis, survivant, cahiers, arrestation, la Libération, captivité, Buchenwald, désarroi, angoisse, Liberté, emprisonnement, rescapé(s), prisonnier(s), mourir, mort, miliciens, collaborateurs, François Mitterrand, Jacques Morland, incertitude(s), culpabilité, souffrances physiques, souffrances morales, résilience, dénonciation, arrestation, retrouvailles, peur(s), dysenterie, Compiègne, prisonniers politiques


Présentation :

J'ai retrouvé ce journal dans deux cahiers des armoires bleues de Neauphle-le-Château. Je n'ai aucun souvenir de l'avoir écrit.

Je sais que je l'ai fait, que c'est moi qui l'ai écrit, je reconnais mon écriture et le détail de ce que je raconte, je revois l'endroit, la gare d'Orsay, les trajets, mais je ne me vois pas écrivant ce Journal. Quand l'aurais-je écrit, en quelle année, à quelles heures du jour, dans quelles maisons? Je ne sais plus rien.

Comment ai-je pu écrire cette chose que je ne sais pas encore nommer et qui m'épouvante quand je la relis. Comment ai-je pu de même abandonner ce texte pendant des années dans cette maison de campagne régulièrement inondée en hiver.

La douleur est une des choses les plus importantes de ma vie. Le mot « écrit » ne conviendrait pas. Je me suis trouvée devant des pages régulièrement pleines d'une petite écriture extraordinairement régulière et calme. Je me suis trouvée devant un désordre phénoménal de la pensée et du sentiment auquel je n'ai pas osé toucher et au regard de quoi la littérature m'a fait honte."


Ma Chronique :


De Marguerite Duras, je n’avais lu que "l’Amant" (Prix Goncourt 1984). Qu’on aime ou pas, elle ne laisse en aucun cas indifférente...


A la lecture de ce recueil, écrit à partir d’un journal tenu par Marguerite D. à l’arrestation de son mari en 44, je suis restée … soufflée, sidérée et sous le choc.


Ces livres que l’on referme mais qui vous reste en tête et dans le cœur des jours, des années… Un chef d’œuvre en somme. Ce livre je ne pouvais pas le chroniquer ni à chaud, ni après… ce fut long, très long à assimiler. Toute cette horreur, l’indicible...


Même si des polémiques se sont élevées à l’époque de sa parution (doute sur la véracité du récit) il n’en reste pas moins que ces choses ont existé et peu importe si Duras l’a romancé après coup. D’ailleurs peut-on parler de « romance » ???!!!


Même si elle a retranscrit le réel en le modifiant, et quand bien même ? Elle nous dit bien qu’il s’agit un livre écrit « à partir » d’un journal écrit « à l’époque » et dont elle ne se souviens pas l’avoir écrit ? Donc il y a fatalement, réinterprétation… je le répète : et quand bien même … cela reste un témoignage fort, dénué de sensibilité certes, mais saisissant, ce qui donne une profondeur particulière au récit.


Les phrases succinctes, brèves, brusques, syncopées et sans apparat contribue à l’effet « choc ». Elle nous balance l’horreur en pleine figure. C’est un récit de l’attente, d’une longue attente. Les trajets, les va-et-vient de son appartement à la Gare d’Orsay et de son appartement à l’hôtel Lutétia aussi.


J’ai reçu les mots comme des coups de poings. Ces mots qui claquent comme des coups de fusil marquent votre esprit, durablement. Un condensé brut d’émotions qu’elle n’exprime pourtant pas. Parce que la « douleur » est au-delà des mots.


J’ai attendu de prendre de la distance. De laisser les émotions fortes retomber un peu. J’ai attendu 12 ans… eh, oui, 12 années pour réussir à avoir la tête à peu près froide et pour être capable de parler de cet écrit. Livre peut être lu trop jeune… et qui m'a fait l'effet d'une déflagration.


Oui, ce livre m’a terrassée, me laissant horrifiée. La force du propos vous gifle et vous laisse K.O. scotchée et même pire.


C’est une œuvre féroce et terriblement « humaine » dans la déshumanisation ». Souffrances physiques, souffrances morales et la redondance des termes scatologiques entre pour beaucoup dans la violence que produit le texte.


La minutie des descriptions de toutes les étapes endurées par son mari (la nourriture, les excréments) et par elle par contrecoup est éprouvante. C'est un lent et difficile chemin vers la « résurrection » où rien ne nous est épargné à la limite du tolérable parfois. C’est déchirant d’impuissance.


S’agit-il d’exorciser la douleur en la couchant sur du papier, en la nommant dans toute son ignominie avec la plus grande impudeur. Transformer la douleur en spectacle pour en déplacer la source puis l’oublier (c’est la raison pour laquelle elle ne se souvient pas de ce journal ?).


Marguerite Duras fait partie du courant néo-réaliste avec un style d’écriture bien particulière. Ses phrases déstructurées, épileptiques, spasmodiques, saccadées nous fait penser à du langage vernaculaire (langage parlé par une communauté - qu’elle seule connaitrait...), où l’espoir est martelé comme un mantra puis succède au désespoir ou entre désespérance et espoir dans la même phrase. Parfois même il n'y a pas d’alternance, c’est les deux à la fois simultanément.


Ceci relève d’un très grand modernisme pour l’époque où les romans « classiques » ne marquent pas de discontinuité dans le temps, entre autres.


Ce style révolutionnaire (révolution du style dit classique) n’est pas compris par tous (et jusqu’à maintenant). De même que ses prises de position ultérieures feront débat. Son alcoolisme avéré n’aidera pas non plus. Elle reste cependant une grande femme de lettres contemporaine complètement avant-gardiste et novatrice.


Ce récit est suivi de cinq autres nouvelles sur les réseaux de résistance, l'épurement forcené et aveugle (tuer tous au moindre soupçon – comme en 1789 !) exprime le besoin de vengeance. Ces nouvelles parlent des persécutés et des délaissés. Un condensé des différentes facettes de la guerre, un panel de situations aussi bien du côté des « vainqueurs » que des « vaincus ».


Fiction ou non, ou en partie, ça reste et restera une œuvre majeure à mon sens.

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